Comment gagner du temps en descente ?

Par Christophe Malardé - Entraîneur Trail et auteur du Guide du Trail et de la course nature

Si vous vous posez la question dans ce sens, et que vous consultez cet article, c’est que l’exercice, qui consiste une fois le sommet franchi à redescendre dans la vallée, vous à, un jour ou l’autre, posé problème. Il est vrai que si l’identité et la difficulté d’un trail se mesure à sa distance et son D+, il ne faudrait pas oublier dans cette équation la dénivelée négative.

Si cette dernière, dans de bonnes conditions de course peut vite se passer, elle peut sur certaines portions et/ou selon votre fatigue, vous poser de vrais problèmes. Et autant, il est facile d’accepter de marcher en montée, voire sur le plat pour finir, autant il est frustrant de ne pas pouvoir placer une foulée efficace dans des portions descendantes. Je vous propose ici quelques pistes de réflexions.

Trouver ses facteurs limitants

Quels sont les facteurs qui limitent votre progression en descente ? C’est cette première question que vous devez vous poser. De manière générale, il y a trois catégories de problématiques qui peuvent se traiter de manière distinctes même si chaque partie interagit sur l’autre. Le premier frein est psychologique : c’est la crainte, la peur de tomber, de glisser, de se faire une entorse. Il se traduit par de la crispation, par un manque de relâchement et une prise de risques minimum. Le second frein est de l’ordre de la technique. Vous ne savez pas faire. Vous ne savez pas descendre cette dalle rocheuse humide et calcaire, vous ne savez pas choisir entre deux trajectoires, vous ne savez pas…parce que vous n’avez jamais fait ! Le troisième frein, je le qualifierais de  »mécanique ».

Vous voulez, vous savez mais vous ne pouvez pas parce que vos cuisses brûlent trop, parce que vous êtes au fond de vos chaussures avec des doigts de pieds douloureux, parce que votre grip n’est pas adapté, parce que vous êtes sujet à des entorses régulières. Autour de ces trois problématiques, identifiez celle qui vous à posée un souci la dernière fois. Pour aller plus loin ou pour vous aider, réfléchissez à l’inverse à vos bonnes descentes. Pourquoi étaient-elles bonnes ? Qu’est ce qui les différencient ? Lorsque vous avez mis le doigt sur vos lacunes, il reste à les travailler dans la mesure du possible.

Vaincre sa peur

Glisser, déraper, chuter font partie de la course. On l’évite autant que possible mais on n’y échappe pas ! En course à pied, les conséquences sont souvent minimes : on salit son short, ses mains, on perd un peu de vernis sur les jambes ou les coudes mais rare sont les cas de fracture. Nous ne sommes pas dans le cyclisme, où les conséquences d’une chute sont nettement plus graves. Vous devez trouver la peur qui vous bloque et surtout la parade psychologique qui vous sortira de cette angoisse. C’est une vraie réflexion à avoir et qui doit se faire de manière posée, seul ou accompagné… mais vous devez verbaliser cela et y revenir de temps à autre pour se rappeler des bonnes clés.

Mais l’on a moins peur lorsque l’on se familiarise avec les éléments. Vous passez à chaque entraînement dans des descentes. Vous passez, mais vous ne vous y arrêtez pas…et si pour chaque descente, vous enleviez vos écouteurs, vous arrêtiez de parler avec votre compagnon de course et vous vous concentriez sur ce que vous faites et comment vous l’avez fait, en repassant une seconde fois si nécessaire, en tentant des choses, hors de la piste classique.

Prenez vos repères et vous serez ainsi que la dalle en granit se descend sans problèmes par tous les temps…contrairement à la dalle de calcaire ou schiste. Vous saurez poser vos pieds à plat pour conserver du grip et pas en attaquant uniquement des talons…sauf dans certains cas ! Bref vous étofferez votre bagage technique, vous évacuerez des craintes, vous gagnerez en assurance ! La lecture du terrain est aussi primordiale. Analyser le passage, trouver l’appui et faire ce choix d’appui doit être un automatisme qui se travaille. Le VTT permet ce travail d’analyse de trajectoire à haute vitesse. Réalisez-le !

Etre relâché

Le relâchement est aussi un facteur prépondérant d’une bonne descente. Il s’acquiert par le travail expliqué ci-dessus et agit directement et positivement sur votre physique. Il faut donc le conserver le plus longtemps possible. Pensez à souffler dans vos joues, relâchez la mâchoire et les bras sur des moments de répits. Je fais notamment attention à cet aspect sur les premiers mètres ou les premières minutes de ma descente. Ils sont primordiaux pour la suite. En haut de la bosse, on arrive avec de la fatigue, de la fébrilité, un manque de lucidité. Démarrer par une chute, c’est la meilleure façon de se bloquer ! A l’inverse, bien démarrer sa descente (même à une vitesse un peu plus réduite), c’est engranger de la confiance pour la suite et avoir la possibilité d’accélérer jusqu’en bas !

La course en descente sollicite les quadriceps mais également les lombaires et la ceinture abdominale. Il est indispensable dans une préparation trail digne de ce nom d’inclure des exercices de renforcement pour limiter les dégâts. Commencez par du travail de gainage puis vous terminerez cette session de renforcement par du travail excentrique (c’est-à-dire en contraction freinée). Vous veillerez toutefois à suffisamment l’espacer de votre rendez-vous course avec au minimum trois semaines entre la dernière séance et votre compétition. De temps en temps, et sur des portions bien précises et limitées dans le temps, faites également des descentes à haute vitesse. Si cet effort traumatisant doit rester mesuré dans une programmation, il reste intéressant pour  »se blinder » les cuisses ! Mais gare aux bobos ! Donc avec PRECAUTIONS ! Si vos chevilles vous rappellent à l’ordre régulièrement, poursuivez le travail de proprio-réceptivités entamé chez le kiné ! Faites des straps si nécessaires !

L’usage de bâtons peut aussi être utile en descente pour avoir des appuis supplémentaires, pour contrôler sa chute, pour se freiner, pour soulager vos cuisses de l’impact freinage. Mais là encore çà se travaille à l’entraînement au risque de vous faire des croches-pattes avec vos propres bâtons;-).

Enfin une dernière astuce qui peut vous être utile…Au sommet, avant d’attaquer la descente et surtout dans la seconde partie de la course, où votre laçage commence à être détendu, pensez à le resserrer ! Votre pied retrouvera un appui sur le haut de la chaussure et pas uniquement sur le bout de vos orteils. Vous perdrez 10 » là haut mais vous gagnerez en confort, en efficacité et sauverez peut-être quelques ongles…utiles pour la suite !

Descendre vite mais pas à n’importe quel prix

Car au final la question de l’attitude à avoir en descente doit se poser en rapport avec ce qui suit cette descente. Si c’est l’arrivée, le calcul est simple : Tout schuss..pour finir !!! Mais si cette descente se trouve au milieu de la course, le calcul est tout autre. La question n’est plus de gagner du temps, mais d’en perdre le moins possible en conservant le maximum d’aptitudes physiques pour enchaîner la suite.

Prendre le risque de gagner du temps, c’est attaquer son capital physique prématurément, c’est prendre de gros risques (chute, entorse) pour un capital temps minime. Il ne faut pas surjouer sa descente. C’est peut-être votre point faible mais si vous êtes encore au bout de 5 heures avec cette personne qui descend à toute berzingue chaque descente, c’est que vous avez aussi d’autres qualités à faire valoir et que vous ne devez pas les entamer en essayant de le suivre. La règle serait alors de dire qu’il faut oser mais maîtriser ! La frontière est infime et personnelle… à vous de la trouver !

Bon run!!!

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